Un logiciel inédit servant à résoudre des problèmes de mécanique du solide déformable passe de la Recherche au monde industriel. La SATT Ouest Valorisation, pour le compte de l’université Bretagne Sud, et le Centre technique des industries mécaniques viennent de signer un accord de licence.
Herezh++. Derrière ce nom bien breton (« héritage » en français) se cache le logiciel de simulation du comportement mécanique de pièces et de structures de Gérard Rio, chercheur à l’université Bretagne Sud (voir interview ci-après). Le Cetim, conscient de l’utilité de cette technologie novatrice, a signé un accord de licence avec la SATT Ouest Valorisation en mai afin de pouvoir l’exploiter dans le cadre de problématiques liées à l’étanchéité dans le secteur industriel.
« Le code de calculs Herezh++ a l’avantage de présenter des lois permettant de décrire des comportements mécaniques complexes », souligne Benoit Omnès, ingénieur en technologies de l’étanchéité au Cetim. Les codes de calculs existants aujourd’hui dans le commerce ne sont, en effet, pas pourvus de ce type de lois. « La loi hyperélasto-visco-hystérésis (HVH) notamment, permet d’explorer deux domaines liés à l’étanchéité : le comportement mécanique des bagues en graphite matricé expansé utilisées dans le domaine de la robinetterie industrielle et le comportement mécanique des joints toriques en élastomère soumis à de très basses températures. »
SATT et Cetim partenaires du transfert
La SATT Ouest Valorisation a concédé au Cetim, pour le compte de l’UBS, une sous-licence d’exploitation non-exclusive du logiciel. « Nos experts confortent les choix de maturation industrielle de technologies innovantes positionnées sur une dizaine de domaines clés pour l’industrie du futur, explique Philippe Gouvaert, directeur délégué à l’innovation et la valorisation de la Recherche au Cetim. Nous donnons aux SATT un éclairage marché sur l’employabilité de telles innovations en fonction de l’état de l’art et des besoins actuels. Les SATT, quant à elles, identifient les projets candidats et financent pour partie la maturation. » Un travail conjoint qui vise à renforcer les transferts de technologies des laboratoires académiques vers l’industrie mécanique.
INTERVIEW: Gérard Rio, chercheur à l’université Bretagne Sud
En quoi consiste Herezh++ ?
C’est un logiciel de simulation du comportement mécanique de pièces et structures. Il permet d’observer comment se comporte la pièce (on la déforme) et quelles sont les contraintes qui sont à l’intérieur. En général avec ce type de logiciel on fait deux choses : dimensionner une pièce et simuler son comportement.
Quelle est sa particularité ?
D’abord, il a été développé en C++ [langage de programmation compilé permettant la programmation sous de multiples paradigmes]. Ensuite, il est conçu pour pouvoir intégrer de nouvelles fonctionnalités de façon modulaires, ce qui est difficile avec la procédure classique. L’aspect modulaire au niveau des lois de comportements est une particularité. L’utilisateur peut, au travers des briques qui ont été intégrées, construire une nouvelle loi sous forme d’addition de lois qui existent déjà.
Enfin, en ce qui concerne la résolution des systèmes d’équation, l’outil reprend les algorithmes traditionnels et les algorithmes particuliers qui sont associés aux comportements de structures globalement stables mais localement instables. Il permet aussi de juxtaposer plusieurs types d’algorithmes de manière à créer un algorithme global particulier.
Comment Herezh++ a « accroché » le Cetim ?
Une thèse a été associée à la validation d’un modèle que j’avais développé au niveau des matériaux poreux. Le Cetim a trouvé intéressant de faire l’acquisition du logiciel pour pouvoir, en interne, simuler et dimensionner le comportement de joints d’étanchéité. Ce sont des joints très particuliers. Ils doivent, par exemple, tenir à plusieurs centaines de degrés. Ils peuvent être en graphites et devoir assurer l’étanchéité pour des matériaux dangereux ou sous pression. L’outil Herezh++ permet, sous certaines conditions, de réaliser des simulations qui n’étaient pas accessibles auparavant, notamment au niveau des lois de comportement.
Transférer votre invention vers les acteurs économiques, c’est important pour vous ?
C’est toujours très motivant de voir que ce qu’on a développé sert à quelque chose. L’utilisation au niveau industriel est intéressante, d’autant plus dans un domaine très technique, où les conséquences financières peuvent être importantes.