La société CHRONOCAM SAS a été fondée en 2014 par Luca Verre, son actuel dirigeant, Ryad Benosman et Christoph Posch,ces derniers étant alors respectivement maître de Conférence et Professeur à l’UPMC au sein de l’Institut de la Vision (UPMC/CNRS/INSERM), spécialistes de la vision neuromorphique. Elle a pour objet l’exploitation de la technologie des caméras asynchrones. Contrairement aux capteurs CMOS classiques fonctionnant trame par trame à l’aide d’une horloge interne arbitraire, la technologie CHRONOCAM propose de ne traiter que les évènements changeant pixel par pixel (event-based camera).
Cette technologie insuffle une dynamique entièrement nouvelle dans le domaine car elle permet d’atteindre une vitesse d’acquisition ultra-rapide (100 000 fps), d’offrir une excellente dynamique de fonctionnement (base / haute intensité) et de réaliser des compressions très importantes (10-1000x) tout en réduisant la consommation. Cette innovation qui vise des domaines d’applications extrêmement variés (aérospatial, automobile, robotique, terminaux mobiles, IoT,…) devrait rapidement bouleverser le marché de la vision en général. Au regard du potentiel de la technologie, le groupe Renault a souhaité s’associer à CHRONOCAM dans un partenariat stratégique autour des systèmes de conduite avancés et particulièrement dans la détection des personnes et des obstacles.
En 2015, près d’un an après son démarrage, CHRONOCAM a levé 750 k€ auprès de Robert Bosch Venture Capital et du CEA Investissement. La société vient de réaliser une nouvelle levée de fonds de 15 M€. Dans le cadre de son activité elle bénéficie d’une licence d’exploitation de brevets, négociée avec Lutech, portant sur les algorithmes de traitement d’image asynchrone issus des recherches menées par l’UPMC, le CNRS et l’INSERM au sein de l’Institut de la Vision(*).
CHRONOCAM est parmi les start-up à suivre en 2017 !
(*) Pour de plus amples informations sur les travaux menés au sein de l’Institut c’est ici et pour en savoir plus sur l’activité la restauration visuelle n’hésitez pas à suivre le Pr. José-Alain Sahel, directeur de l’Institut, au travers la Chaire d’Innovation Technologique Liliane Bettencourt “Voir encore : la restauration visuelle en perspectives”
Nous avons interrogé en décembre Luca Verre, CEO de CHRONOCAM, pour nous parler du lien entre les chercheurs et le monde entrepreneurial, ainsi que Bertrand de Fürst, chargé d’affaire chez Lutech, pour évoquer les licences de technologies.
[Luca Verre] Durant votre parcours professionnel vous semblez toujours avoir été proche du monde de la recherche, qu’est-ce qui motive cet attachement ?
Lucas Verre indique que sa proximité au monde de la recherche lui semble ténue et il met en avant son parcours d’ingénieur (appliqué) ainsi que son activité chez SCHNEIDER au début de sa carrière. Il souligne que son parcours l’a amené à conduire des projet et se saisir des enjeux marketing. Il précise que son MBA a été pour lui l’occasion de prendre une année sabbatique et de débuter un projet entrepreneurial. C’est dans ce contexte qu’il a rencontré Ryad Benosman et Christophe Posch autour de la vision neuromorphique (**).
(**) Pour en savoir plus sur la vision neuromorphique depuis 1540 avec Léonard de Vinci retrouvez l’intervention de Ryad Benosman au Collège de France ici
[Luca Verre] Comment êtes-vous venu à vous intéresser aux technologies issues de l’Institut de la Vision ?
Dès ses premiers échanges avec les chercheurs Luca Verre a été enthousiasmé par le caractère disruptif de la technologie ainsi que les nombreuses applications que celle-ci pouvait avoir. En effet il considère que ces point sont particulièrement pertinents pour garantir un succès en termes de business. Il précise que la rencontre avec les chercheurs s’est faite grâce à la connexion de son réseau entrepreneurial et celui de l’Institut de la Vision.
[Luca Verre] Quels conseils donneriez-vous à des laboratoires désireux de transférer les résultats de leur recherche ainsi que leurs compétences vers le monde socio-économique, que ce soit au travers de la création de start-up ou la mise en place de licence d’exploitation ?
Luca, lors des échanges qu’il a eu avec des acteurs académiques, a ressenti un manque de lien entre le monde de la recherche et le monde socio-économique. De son point de vue il existe de nombreuses technologies innovantes au sein des laboratoires attendent d’être saisie pour être intégrées dans des produits. Il estime que Lutech remplit son rôle en facilitant le transfert pour permettre l’exploitation des résultats de recherche.
Il pense que l’écosystème dans lequel évoluent les laboratoires devraient être consolidé afin que les chercheurs puissent aisément rencontrer des interlocuteurs à même de les éclairer sur tous les sujets en lien avec les entreprises, il cite les accélérateurs, les incubateurs ou encore les école de business et met en avant, spécifiquement pour les projets de start-up, les sujets du financement et de l’amorçage. Il évoque les structures au sein de la silicon valley qu’il met en perspective avec l’activité de Lutech et précise que sur le sujet des start-ups la clef du succès réside dans l’association de l’accélérateur, du venture-capitalist et de l’entrepreneur.
[Bertrand de Fürst] Qu’est-ce qu’une licence ?
Une licence est un contrat qui encadre la concession de droits d’exploitation. Un brevet définit une invention et confère le droit d’en interdire l’exploitation commerciale par un tiers. Une licence d’exploitation de brevet permet alors au titulaire de ce droit d’autoriser le tiers licencié à exploiter cette invention (à ne pas lui opposer son droit d’interdire) d’une part, et de permettre audit tiers d’opposer si nécessaire ces droits auprès de ses concurrents. A noter qu’en cas d’exclusivité, le tiers licencié bénéficie alors d’un monopole d’exploitation. Une licence est généralement concédée avec une contrepartie financière de la part du licencié (redevance, sommes forfaitaires, etc.).