#Une IA frugale pour automatiser l’analyse des nuages de points

Lancée en mai 2024, la nouvelle startup Deeptech toulousaine RollingDot développe une solution innovante d’analyse géométrique en 3D basée sur une intelligence artificielle puissante mais peu consommatrice en puissance de calcul.
Ce projet a bénéficié en amont d’un important investissement de Toulouse Tech Transfer qui signe avec la Startup sa 200ème licence d’exploitation. Une création qui s’inscrit pleinement dans la stratégie de la SATT visant à accroître l’émergence de startups Deeptechs : 8 en 2023, 9 en 2024, contre 3 en moyenne par an jusqu’en 2022.
Une IA frugale, écologique et sans Datacenter
Cette technologie a été conçue et développée par David Vanderhaeghe, Loïc Barthe et Nicolas Mellado, chercheurs à l’Institut de Recherche en Informatique de Toulouse (IRIT). Pour fonder l’entreprise, ils ont été rejoints par Colin Garriga-Salaün et Emmanuel Giubilato. Professionnels du développement de PME innovantes, ils avaient respectivement fondé et développé commercialement la startup de marketing mobile MyElefant, avant son rachat par la société suédoise Sinch. L’IA de RollingDot se destine notamment aux géomètres, connus pour arpenter et mesurer les terrains et propriétés.
« Notre application leur permet de reconstituer numériquement la forme de maisons, de bâtiments, d’environnements naturels... Au départ, ils procèdent à la captation de données 3D depuis le sol ou avec des drones, avions, hélicoptères… qui embarquent des appareils de mesure basés sur une technologie de laser, dite LiDAR, ou photographique, dite de photogrammétrie. Des nuages comportant des millions de points sont alors générés. Notre IA va alors traiter cette base, en repérant puis dessinant automatiquement les lignes, courbes et surfaces avec leur texture. Et ainsi recréer l’objet en 3D. » Colin Garriga-Salaün, président de RollingDot
La tâche, automatisée par RollingDot, est habituellement longue et fastidieuse car elle faite manuellement par des opérateurs utilisant des logiciels de CAO. Suppléé par l’IA, l’humain reste néanmoins important pour corriger les imperfections qui peuvent rester après la formation de l’image. Les activités de ce type existent depuis longtemps. Les sociétés de géomètres répondent en effet à de nombreuses demandes d’architectes, de bureaux d’études, de services d’urbanismes... L’ampleur de certains projets, comme la reproduction en 3D d’un territoire, d’une ville... les conduisent à les délocaliser au Maroc, en Inde ou à Madagascar. CE que des applications telles que celle de RollingDot permettent de minimiser.
Un avantage concurrentiel manifeste
« Nous avons pu développer un algorithme d’IA qui s’avère particulièrement frugal en besoin de calcul. Pour donner un exemple, notre application est capable de traiter 200 millions de points en une heure sur un ordinateur portable, là où les solutions concurrentes peuvent prendre plusieurs jours. Et cela, en exploitant les serveurs d’un datacenter distant. Ce qui change complètement la donne. » David Vanderhaeghe, Co-Founder & CSO de RollingDot
Conséquence de ce progrès technologique : son inscription parfaite dans la transition écologique, alors que de nombreux spécialistes alertent sur la consommation électrique considérable que peuvent générer les IA de type ChatGPT. « La légèreté de notre application est un véritable atout. Le gain en termes d’empreinte carbone est manifeste », souligne Emmanuel Giubilato, chargé du développement marketing et commercial de l’entreprise.
Au titre de projet démonstrateur, RollingDot a réalisé le modèle 3D d’un ensemble complexe de lignes à haute tension dans un environnement à la végétation irrégulière. Le nuage de points a été généré par des capteurs LiDAR embarqués sur des drones. Le résultat produit par l’IA de RollingDot est saisissant : il permet de distinguer les différents composants de la structure électrique, tels que pylônes, lignes électriques, composants… Avec une représentation aussi précise, les opérateurs de réseau électrique pourront mieux anticiper les besoins de maintenance et de réparation, en identifiant par exemple les éléments endommagés par un orage, ou encore les arbres trop hauts nécessitant d’être élagués. D’autres cas d’usages ont été développés dans le domaine industriel ou encore sur la base de nuages de points produits dans le cadre de campagnes de cartographie de la France par l’IGN.
Un engagement fort de Toulouse Tech Transfer
Les chercheurs de l’IRIT travaillent en effet depuis une dizaine d’années à développer des briques logicielles dans le domaine de l’analyse géométrique, avec l’idée de les proposer à des entreprises. Une démarche que la SATT Toulouse Tech Transfer a pu inciter.
« Il y a déjà 7 ou 8 ans, nous avons été démarchés par des membres de la SATT pour nous proposer des idées de valorisation. Ils nous ont mis en relation avec deux entreprises de leur réseau qui se sont montrées intéressées par nos compétences et nos technologies. Par exemple, nous en avons aidé une à résoudre un problème d’affichage en 3 dimensions. TTT nous a ainsi aidé à faire un dépôt d’invention et a établi une licence d’exploitation de ce développement logiciel. Tout au long de ces années, qui ont permis de développer un lien de confiance, nous avons porté 4 projets de transferts de technologie, dont deux ont été effectifs. Nous avons fait le choix d’aller plus loin en créant une entreprise : l’idée était de mieux maîtriser et de poursuivre le développement technique et commercial de nos innovations. » David Vanderhaeghe, Co-Founder & CSO de RollingDot
In fine, RollingDot a bénéficié d’un accompagnement public par Pôle Universitaire d’Innovation (PUI) de Toulouse, dans le cadre duquel la Toulouse Tech Transfer s’est fortement impliquée.
« Au total, nous avons abondé 350 000 euros au financement du projet, en amont du lancement de RollingDot. C’est l’un de nos plus gros projets dans le numérique. C’est le fruit d’une démarche qui s’inscrit plus largement dans un partenariat de long terme avec l’Institut de Recherches en Informatique de Toulouse. » Jérôme Lelasseux, directeur projets IA et numérique de TTT
En l'occurrence, la SATT a financé une première étude de marché puis l’embauche d’un ingénieur de développement logiciel pour 18 mois au titre de la maturation technologique. Des conseils ont également été prodigués en matière de recrutement et sur l’utilisation de la loi Pacte. Cette dernière autorise, sous certaines conditions, la mise à disponibilité partielle des chercheurs. Ils peuvent ainsi continuer à mener leurs travaux de recherches tout en dédiant une partie de leur temps à leur entreprise.

Last but not least, Toulouse Tech Transfer a pris une participation de 10 % au capital de la société, confirmant sa confiance dans l’équipe et son projet. Dans le même temps, RollingDot a signé une licence d’exploitation établie par la SATT, la 200ème de son existence. Elle permettra de rémunérer ces acteurs sous forme de royalties issues des ventes qui seront réalisées par la startup. Des revenus qui seront également versés à l’université de Toulouse et aux chercheurs de l’IRIT.
Une BFT Lab, financée par Bpifrance, a en outre été octroyée par le comité de financement du PUI de Toulouse. Soit une somme substantielle de 115 000 euros qui a permis de financer le portage salarial des dirigeants ainsi que des premiers éléments de communication avant la création de l’entreprise. De même, le recrutement de deux ingénieurs de développement logiciel – dont celui qui avait déjà travaillé sur le projet – a pu être réalisé par la startup qui loue maintenant un bureau au sein du bâtiment de l’IRIT. Désormais, c’est Nubbo, l’incubateur de la Région Occitanie, qui a pris le relais pour accompagner le développement de RollingDot. La société bénéficie de 50 000 euros supplémentaires pour financer des actions de communication, de marketing, ou encore pour faire appel à des juristes dans la rédaction de documents.